Guerre en RDC : la presse menacée ?

Article : Guerre en RDC : la presse menacée ?
Crédit: Des militaires FARDC en patrouille à Aveba. Crédit : MONUSCO Photos, via Flickr
18 juin 2024

Guerre en RDC : la presse menacée ?

Les combats qui se déroulent dans l’est de la République démocratique du Congo mettent la liberté de la presse à rude épreuve. Les journalistes sont confrontés à l’obligation de renforcer la propagande anti-rébellion, sous peine de sanctions sévères de la part des autorités.

Être reporter en temps de guerre n’a jamais été simple. Il l’est encore beaucoup moins en République démocratique du Congo. Le pays fait face à une montée de crise dans sa partie est, où une rébellion hybride s’affronte avec l’armée régulière. Face à cette situation, les journalistes sont partagés entre la volonté d’informer de manière indépendante sur les faits collectés sur terrain et l’obligation de prendre parti tel que leur exigent les autorités. 

Au mois de mars dernier, le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel et de la Communication (CSAC), sans prendre de gants, a imposé une ligne pour les journalistes en ce qui concerne la guerre dans l’est de la RDC. Il a interdit aux médias de mettre à la disposition du public des émissions interactives sur les opérations militaires, et surtout d’accorder des interviews aux rebelles dont certains ont occupé d’énormes responsabilités dans les institutions politiques du pays. Une mesure qui viole délibérément la règle des « deux sons de cloche », pilier d’un journalisme indépendant dans un contexte marqué par des tensions grandissantes. 

Manipulations, intimidations et arrestations

Quoiqu’il justifie ses mesures par le souci de privilégier une information “constructive” sur la guerre dans l’est du pays, le CSAC peine à convaincre. Cet organe, censé réguler les médias en RDC, a longtemps perdu sa crédibilité notamment auprès des associations de défense de la presse indépendante. Celles-ci sont persuadées qu’il s’agit d’un instrument de répression que l’État congolais utilise pour assujettir les médias beaucoup trop « affranchis » à son goût. 

Avec ses nouvelles mesures sur la couverture de la guerre dans l’est de la RDC, le CSAC, dont la détermination à fragiliser les efforts pour l’indépendance de la presse se profile, contribue à un climat de terreur dans le paysage médiatique congolais. Quelques rares journalistes qui tentent de braver les interdits au nom de la liberté de la presse sont accusés d’apologie à la rébellion, soit de complicité avec les forces négatives. Ils sont systématiquement intimidés, voire brutalement arrêtés et détenus par les services de renseignement congolais. Le 17 avril dernier, Maranatha Balikwisha, journaliste de terrain et témoin des affrontements entre la rébellion et l’armée régulière, avait été arrêtée et détenue pendant plus de deux semaines par les services de renseignement militaires congolais pour avoir été en contact avec les rebelles dans le cadre de son travail.

À l’instar de Maranatha Balikwisha, plusieurs autres journalistes sont persécutés pour leur travail. Certains croupissent encore dans différentes geôles en RDC pour le simple fait d’avoir osé interviewer les rebelles. Tous, ils paient les frais de leur détermination à nager à contre-courant dans un environnement qui devient de plus en plus hostile à l’indépendance de la presse surtout en période des conflits. 

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